Dans le cadre du processus d’élargissement de l’Union européenne, s'est tenu le 4 juillet dernier à Paris un Sommet pour les Balkans occidentaux. Au programme cette année, notamment la signature de l’accord permettant le lancement de l’Office régional pour la coopération de la Jeunesse (Regional Youth Cooperation Office – RYCO) dans les Balkans occidentaux par les Premiers ministres des six pays qui les composent, les « Western Balkans 6 » ou WB6 : l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Kosovo, l'ARYM - Ancienne République yougoslave de Macédoine, le Monténégro et la Serbie.
Faire coopérer les jeunesses des WB6 pour améliorer les relations entre les Etats de la région
Candidats officiels ou potentiels à l’entrée dans l’Union européenne, les WB6 sont encouragés à mettre en œuvre des réformes nécessaires à leur intégration, permettant notamment la stabilisation des relations diplomatiques au sein de la région, où les conflits des dernières décennies ont créé de nombreuses tensions. A cet égard, les six chefs de gouvernement des Balkans occidentaux ont signé l’année dernière, lors du précédent sommet à Vienne, la Déclaration commune pour l’organisation de la coopération de la jeunesse des Balkans occidentaux qui décrit les orientations du RYCO. Inspirée de l’Office franco-allemand pour la Jeunesse, l'OFAJ, l’organisation est fondée sur l’idée qu’une coopération régionale durable passe en premier lieu par la compréhension, la tolérance et l’amitié entre les jeunesses des six pays mais également avec les jeunes européens, grâce au financement de programmes d’échanges.
L’accord signé à Paris permettra de lancer la création du RYCO dont la définition des activités et des missions, le budget ou encore l’organigramme sont le résultat de nombreuses discussions, initiées au sein d'un groupe de travail dédié dès novembre 2015, trois mois après le sommet de Vienne. Nicolas Moll, l’un des modérateurs du groupe et ancien membre de la direction de l’OFAJ, explique que « l’amélioration des relations entre les pays […] doit avoir lieu à différents niveaux. Les jeunes en font partie et leur contribution est d’autant plus importante que se trouvent parmi eux les futurs dirigeants qui prendront des décisions qui influenceront l’évolution des relations internationales »1.
Le porte-parolat du ministère français des Affaires étrangères et du Développement international a d'ailleurs rappelé le 17 juin dernier l’importance de la création de cette organisation pour la jeunesse. L’objectif du Sommet Paris-Balkans était en effet de « favoriser l’intégration régionale à partir de sujets concrets : l’économie et la jeunesse »2. Harlem Désir, Secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, avait d’ailleurs rencontré les initiateurs du projet le 16 mars dernier à Paris.
Un projet pensé par les jeunes
Modéré par trois membres ou anciens membres de l’OFAJ, le groupe de travail qui a pensé le RYCO était composé pour chaque pays d’un représentant du ministère chargé de la Jeunesse, et d’un représentant d’une organisation nationale de jeunesse afin d’impliquer la société civile. Parmi les membres de ce groupe de travail, on compte ainsi par exemple Krenare Gashi, directrice exécutive du Kosovo Youth Centers’ Network, ou Rejan Igor Roić, membre de la commission de Bosnie-Herzégovine pour la coordination des questions concernant la Jeunesse.
Cela implique que « durant toutes les sessions de travail, les représentants des organisations de jeunesse étaient sur un pied d’égalité avec les représentants des ministères chargés de la Jeunesse des WB6 » souligne Nicolas Moll. Toutes les propositions structurant le futur RYCO sont le fruit d'un consensus au sein de ce groupe dont l’organisation semble particulièrement favorable à la discussion, d’autant plus que « les représentants des gouvernements sont eux-mêmes jeunes, ils connaissent également très bien ce à quoi sont confrontées les organisations de jeunesses de leurs pays […]. C’est pourquoi il y eu une véritable […] volonté commune de créer la meilleure organisation pour les jeunesses de tous les pays participants ».
Après de nombreuses réunions et discussions au sein du groupe de travail, le projet a été rassemblé dans plusieurs textes. Ce que les premiers ministres des WB6 ont signé à Paris, ce sont l’accord et les statuts, c’est-à-dire la base légale de l’organisation, tandis que les textes qui définissent les valeurs, les missions, les activités et le budget du RYCO seront transférés au Secrétariat général et au Comité de direction une fois ces dernières instances créées.
Créer des opportunités
Confrontés à des taux de chômage qui dépassent 40 % en 2013 pour les 15-24 ans (sauf en Albanie où il était de 28,4 %)3 et au manque d’institutions fiables dans la région des Balkans occidentaux, les jeunes des WB6 manquent d’opportunités. L’objectif du RYCO est donc d’en créer de nouvelles, durables, dès que seront mises en place les instances de décisions de l’organisation. Nicolas Moll espère ainsi que dès janvier 2017, « le RYCO pourra commencer à distribuer des subventions aux organisations de jeunesse de la région qui veulent organiser des programmes d’échanges individuels ou collectifs […] tant qu’elles respectent ses objectifs : promouvoir la diversité, les valeurs démocratiques et européennes, la réconciliation, les échanges interculturels, la citoyenneté et l’intégration sociale ».
Au-delà de la signature de l’accord, l’organisation d’événements en marge du sommet pour le lancement du RYCO devait permettre d’expliquer « que cette nouvelle institution aidera [les jeunes] à développer des projets ensemble, ce qui est un signal positif de coopération et contre les égoïsmes nationaux en Europe »4. L’implication de représentants politiques dans ce projet permet de démontrer leur volonté de développer les échanges de jeunes, et plus largement d’améliorer les relations diplomatiques régionales. Une politique qui parait d’autant plus crédible que le futur comité de direction sera organisé comme le groupe de travail : 50 % de jeunes issus de la société civile, 50 % de représentants des gouvernements des WB6, les décisions étant prises par consensus.
Tandis que l’Union européenne est actuellement profondément remise en question par ses citoyens, d’autres pays voient en elle la possibilité d’offrir de plus larges perspectives à leurs jeunesses. Le RYCO subventionnera en effet des programmes d’échanges non seulement entre les jeunesses des Balkans mais également avec d’autres pays européens. Nicolas Moll de conclure : « les échanges subventionnés par le RYCO peuvent être une véritable contribution fondamentale à la coopération et au processus de réconciliation dans la région », mais également « un accompagnement dans le processus d’intégration [des WB6] à l’Union européenne ».
Cet article a été écrit à la suite du point presse du ministère des Affaires étrangères et du Développement international du 17 juin 2016.
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