Le Fonds monétaire international – FMI – et la Banque mondiale ont clôturé début octobre l’année économique 2016. Lors de leurs rencontres annuelles à Washington du 7 au 9 octobre dernier, les nombreux intervenants ont dressé le constat d’une économie mondiale au ralenti, qui ne satisfait pas les espoirs de reprise d’une époque post-crise. Parmi les nombreux sujets évoqués, notamment la situation économique inquiétante des pays dits « émergents », alors qu’ils avaient ces dernières années plutôt su tirer vers le haut la croissance économique mondiale. L’économie des pays développés, quant à elle, peine à repartir.
Le coup de frein porté à l’économie des pays émergents se confirme
Certes, la croissance économique des pays émergents reste nettement supérieure en 2016 – 5,8 % en 2016 selon la Banque mondiale – à celle des pays occidentaux, mais elle est au ralenti, voire sur le déclin. Cette tendance, observée depuis quelques années déjà, se confirme cette année, nourrissant une prévision de croissance mondiale de 2,4 % en 2016 pour la Banque mondiale.
La situation économique actuelle du Brésil est à l'image de celle de l’ensemble des pays émergents. Le PIB national ne fait que reculer, et s’écarte aujourd’hui de 8 % de celui atteint en 2014 – c’est un retour en arrière d’environ 6 ans, alors que la population brésilienne s’est accrue entre temps de onze millions de personnes pour atteindre plus de 204 millions d’habitants. La tendance est comparable en Asie : en Chine, bien que la croissance ait été de 6,7 % en 2016, l’activité économique décélère considérablement. Le ralentissement de l’ensemble de ces pays est dû notamment à la baisse du cours des matières premières, qui les pénalisent en tant que producteurs et exportateurs.
A cette cause extérieure s’ajoutent des causes structurelles propres à ces différentes économies. Par exemple en Inde, si la productivité de l’industrie s’essouffle, c’est sans doute dû aux limites de la productivité des salariés, le niveau d’éducation de la population générale restant faible – le taux d’alphabétisation des adultes atteint 62,8 % de la population. En Chine, la politique de hausse des salaires menée par le gouvernement, supposée stimuler la consommation des ménages, n’a finalement pas eu l’impact espéré, la hausse des prix de l’immobilier et le faible niveau de protection sociale obligeant les ménages à s’endetter. Et de fait, lors du sommet de Washington du 7 au 9 octobre dernier, les économistes ont été unanimes sur la question : améliorer les compétences de l’ensemble de la main-d’œuvre et maintenir une demande élevée sont des conditions nécessaires pour relancer la croissance de ces pays à long terme.
La difficile reprise économique dans les pays développés
Les pays développés, de leur côté, peinent à sortir de leur stagnation post-crise. En Europe, la reprise économique attendue est loin de s’être produite. La tendance est en effet plus à la déception : le taux de croissance a été divisé par deux entre le premier et le deuxième semestre 2016, de 0,6 à 0,3 %. La chute des investissements et de la consommation, deux composantes essentielles de la croissance, inquiète également les analystes. De même le Brexit, dont la date d’effectivité n’est pas encore déterminée, devrait également avoir un impact négatif sur les économies européennes – même si les estimations actuelles ne font pas l’objet d’un consensus à ce stade.
Le cas de la situation économique des Etats-Unis a été particulièrement abordé à Washington lors de ces Rencontres annuelles du FMI et de la Banque mondiale : le pays semble sortir de la crise dont il a été le foyer il y a huit ans, alors que les pays européens subissent encore le contre-coup de la crise de la dette souveraine de 2013. En effet le taux de chômage a désormais retrouvé aux Etats-Unis son niveau d’avant-crise pour avoisiner les 5 %, taux équivalent au plein-emploi désiré par la Réserve fédérale américaine, la FED. C’est aussi la hausse des salaires, autour de 2,5 % dans le pays, qui contribue à la confiance des consommateurs. Le Dow Jones a également fini par retrouver son niveau d’avant-crise à un peu plus de 18 000 points. Autant de facteurs qui laissent entrevoir une réelle reprise économique.
Néanmoins, sous couvert de cette conjoncture plutôt positive, d’autres constats laissent les économistes très sceptiques quant à une réelle reprise de l’économie américaine à moyen et long termes. Le taux de chômage, d’abord, se rapproche certes du plein-emploi mais masque un marché du travail qui se dégrade depuis la crise : la baisse du taux d’activité traduit en effet une augmentation de la proportion de la population exclue du marché du travail, n’étant dès lors plus recensée dans le calcul du taux de chômage au sens du BIT. Un chômage structurel s’implante donc, ce qui engendre à terme des inégalités de revenus et de patrimoine accrues au sein de la société américaine.
Lors des Rencontres annuelles, les débats ont par ailleurs surtout portés sur un phénomène inquiétant : la stagnation de la productivité des entreprises américaines – un enjeu de taille dans un pays où l’innovation a toujours joué un rôle majeur – qui a sensiblement ralenti les investissements. Les raisons de ce ralentissement de la productivité restent mal comprises. Certains économistes soulignent le rôle de la régulation dans cette décélération. Bien que dorénavant la propension des banques à accorder des prêts soit indéniablement nécessaire pour limiter les risques systémiques, les experts soulignent la difficulté pour les jeunes entrepreneurs talentueux à lancer leur entreprise, et par là même relancer l’innovation. De même, le vieillissement de la population américaine est pointé du doigt : avec une population vieillissante, moins apte à prendre des risques, à adopter et à utiliser les nouvelles technologies, une réelle reprise de la productivité aux Etats-Unis semble plus difficile.
In fine, c’est la combinaison d’une demande soutenue, d’un accroissement de la productivité des entreprises et d'une hausse accrue des salaires qui engendreront une réelle accélération de la croissance, qui pourra enfin laisser entrevoir une reprise dans les grands pays avancés. Pour ce faire, les gouvernements sont appelés à promouvoir la compétitivité des entreprises et les jeunes entrepreneurs prometteurs, et à perfectionner les aptitudes des salariés à travers l’éducation.
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